150 documents à lire !
Voilà ce que subit Michel, votre nouvel arrivant lorsqu’il intègre votre société.
C'est le purgatoire !
Après on s'étonne qu’il fasse des erreurs et ne respecte pas les procédures.
Et encore, quand on sait que ces 150 procédures ne couvrent correctement que 50% de ce que Michel fait durant une journée, on ne peut que constater que le système documentaire est un vrai gruyère : bourré de trou, gras et indigeste.
Qui est coupable au final ?
Vous ?
Probablement pas.
En fait, il y a des raisons fondamentales pour lesquelles votre système documentaire est peu performant.
Il y a une dizaine d'années environ, je suis allé diagnostiquer un site pharmaceutique en Angleterre.
Il y avait 30% de documents périmés dans le système documentaire.
C'est énorme !
Le problème venait du fait qu'ils avaient beaucoup trop de documents à maintenir et que l'équipe en charge n'était plus assez efficace ni productive pour maintenir le système à flot.
Ce problème pourrait arriver demain dans n'importe quel labo, mais aussi dans n'importe quelle banque ou n'importe quelle entreprise du secteur de l'énergie.
Les boîtes meurent sous la paperasse.
Dans un autre cas (bien plus récent), on a calculé une efficacité documentaire de moins de 10%.
Ça signifie que Michel l'opérateur a moins de 10% de chance de trouver dans le système de procédures l'information dont il a besoin, au moment où il en a besoin.
Ici, ce cas à 10% est un peu extrême.
En général, on trouve des efficacités documentaires de l'ordre de 25%.
Ce qui reste faible quand on sait qu'un document coûte selon les cas entre 3000 et 5000€ par an pour des petits documents et peut coûter plusieurs centaines de milliers d'euros pas an pour des documents corporate.
Les entreprises jettent littéralement l'argent directement dans la broyeuse à papier, avalé par le monstre documentaire.
Traditionnellement, dans les boîtes, on mesure la performance du système documentaire avec 2 indicateurs : le nombre de documents périmés, le nombre de nouveaux documents créés.
En gros, on mesure que le transit du processus documentaire fonctionne bien.
Et encore…
Souvent, on ne mesure pas les temps de passage, les "pas bons du premier coup", l'âge des en-cours…
Dans tous les cas, on ne mesure pas si les documents gérés sont efficaces pour celui qui en a besoin : Michel.
Michel peut être vous, moi, un opérateur de prod, une personne au contrôle qualité, à la compta, à l'informatique, derrière un guichet client…
Bref, Michel, c'est le travailleur, celui qui exécute des tâches.
On est tous Michel à un moment où l'autre de notre journée.
Et le but du système documentaire est de fournir à Michel, au moment où il exécute sa tâche, l'instruction la plus pertinente possible, au moment où il en a besoin, et que cette instruction soit exacte.
Par le passé, on a inventé un indicateur pour mesurer l'efficacité documentaire : c'est le taux d'efficacité documentaire T.E.D.
Cet indicateur est composé de 3 facteurs :
Premier facteur : le taux de couverture.
On mesure si tout ce que Michel doit faire lors de ses activités est décrit correctement.
La mesure moyenne qu'on fait ici est de l'ordre de 50-60%.
Ça veut dire que la moitié de ce que Michel doit faire n'est décrit nulle part, ou décrit très partiellement.
Deuxième facteur : le taux d'accessibilité.
On mesure si Michel peut accéder facilement à l'information qu'il cherche. Est-ce qu'il sait accéder au système documentaire ?
Ne riez pas…
Nous avons vu des procédures de prod censées être sur ligne et se trouver de l'autre côté de la cloison, dans une armoire.
Ensuite est-ce que Michel sait dans quel document trouver l'info qu'il cherche ?
Là c’est souvent la panique
Est-ce que Michel comprend ce qui est écrit ?
Parce que lorsque des procédures sont rédigées par des ingénieurs dans un bureau, ce n’est pas toujours écrit dans un langage que Michel peut comprendre.
On mesure couramment des accessibilités de moins de 40%.
Enfin, le troisième facteur du T.E.D : la validité de l'information.
Parce que si Michel peut accéder facilement à une information décrite, autant que celle-ci soit juste.
Ici, on mesure le taux de périmés mais aussi le taux d'erreurs dans les documents.
On arrive à un taux de validité qui dépasse facilement 90%.
Et heureusement !
Vu toutes les personnes qui s'occupent de les maintenir...
Au final, le T.E.D est la combinaison de ces 3 facteurs.
Par exemple :
Couverture 50%,
Accessibilité 40%,
Validité 90%.
Ça fait 18% d'Efficacité Documentaire.
Autrement dit, quand Michel a un doute, il n'a que 18% d’avoir l'information qu'il cherche dans le système documentaire, au moment où il en a besoin (en espérant que l’information soit juste).
Donc, pour être sûr, Michel demande de l'aide à René, qui n'en sait finalement pas plus que lui.
Nous sommes dans la culture orale qui génère des dérives de pratiques.
Pourtant, vous dépensez beaucoup d’argent pour maintenir votre système documentaire.
Le problème de fond ici est que le système documentaire n’est pas efficace du point de vue de Michel.
On ne peut pas dire que 18% de T.E.D ce soit bien.
Il faudrait atteindre 70 ou 80% pour être bon.
Pour ça, il faut que le système documentaire soit complètement orienté sur Michel.
Je vous montre tout de suite 3 actions à prendre dès maintenant pour avoir un système documentaire centré sur Michel, l'utilisateur final, qui soit efficace, et qui coûte beaucoup moins cher que votre système actuel.
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Gagnez du temps en lisant notre sommaire :
Action n°1 : construire le système documentaire à partir des activités de Michel.
C'est l’action plus structurante.
Elle agit directement sur le taux de couverture.
Aujourd'hui, votre système documentaire est une vraie passoire du point de vue de Michel.
Les auteurs de procédures écrivent SOP sur SOP parce qu'à chaque fois qu'ils ont une idée ou un requis, ils le mettent dans un document et le poussent vers Michel.
Cette approche « en pluie », laisse des trous béants, non décrits.
La meilleure manière de couvrir 100% de ce que fait Michel est de partir des business process.
On décrit les processus, puis les sous-processus, puis les activités, et seulement après, on vient mettre sur chaque activité tous les requis qualité, hygiène, sécurité, environnement, ou performance qui permettent à Michel de faire le bon geste.
Dès lors, 100% de ce qu'il doit exécuter est décrit.
L'impact direct de cette approche est de vous faire réduire votre volume documentaire de 50 à 80% selon les cas.
Oui oui, on parle bien de supprimer 50 à 80% de vos SOP existantes.
De plus le taux de couverture grimpe facilement à 90% (voire davantage).
Disons 90% pour être raisonnable et pas perfectionniste.
Action n°2: travailler sur l'accessibilité à l'information.
La magie du T.E.D, c'est qu'en face de chaque facteur de l'indicateur, il y a les solutions.
Pour améliorer l'accessibilité à l'information, il suffit de se poser la question.
Concrètement, Michel doit d’abord pouvoir accéder aux documents depuis son poste de travail.
Mettez-lui un PC ou une tablette proche de son poste, voire sur le poste de travail directement.
Enlevez tout ce qui ne sert à rien, mettez-lui des raccourcis vers les documents dont il a besoin.
Encore mieux, si vous avez un Manufacturing Execution System, un MES, pour guider l'exécution et assurer l'enregistrement des données en temps réel, faites directement des liens entre le MES et les documents sur les pages du MES.
Mais ce n’est pas tout.
Nous avons déjà réduit le nombre de documents de 50 à 80%.
Créez alors des liens de navigation entre les documents, comme sur internet dans Wikipédia.
Ensuite, mettez des titres à vos documents afin qu’ils soient explicites.
Pour finir, pour tout ce qui est geste compliqué, faites des tutoriels vidéo comme je vous l'explique ici : 3,5 types de vidéos pour simplifier la documentation et la formation.
C'est plus simple et plus efficace.
Alors oui, je sais, certains d'entre vous vont dire qu’il n’y a qu’à mettre de la réalité augmentée, avec des lunettes et Michel sera guidé automatiquement.
Je vous dis pourquoi pas, mais avec parcimonie alors.
Parce que ça coûte très cher, ce n’est pas facilement maintenable, et pour de vieux produits, de vieilles installations, ou des produits à faible marge, on n'a pas forcément les moyens pour ça.
En revanche, un bon tuto Marmitton fera l’affaire.
Action n°3 : vous assurer que les documents ne contiennent pas d’erreur.
Je sais que vous le faites déjà, mais j'ai vu des sites avec 30% de documents périmés.
J'ai vu aussi des documents non périmés, mais bourrés d'erreur.
Alors si vous diagnostiquez un taux de validité faible, corrigez ça.
Michel va regarder les documents une fois, deux fois et s'il voit des erreurs, il va considérer que tous les documents sont bourrés d'erreur.
Encouragez Michel à signaler les erreurs qu'il découvre dans les documents.
C’est une bonne manière de l'impliquer.
Grâce aux actions 2 et 3, l'accessibilité peut dépasser 90%.
Allez, je vous le fais à 80%.
Poussez un peu la validité à 95% en parallèle.
Du coup, si vous appliquez les recos de cet article, vous aurez : couverture 90%, accessibilité 80%, validité 95%.
Ça nous fait un TED à 70%.
Ce qui est très bien sachant que vous venez de 20%.
Le mot de la fin.
Si vous avez aimé, partagez cet article avec vos équipes qui sont en charge de la documentation et de la formation.
Faites leur calculer un TED et vérifiez que lorsqu'ils font des procédures, ils s'orientent bien sur Michel.
Sur notre site web, vous pouvez aussi accéder gratuitement à une partie de notre formation à la simplification Doc&training...
Alors rendez-vous de l'autre côté !
À bientôt !